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Le BIM vu par les industriels avec Laurent ORTAS chez SAINT-GOBAIN et l'AIMCC | Parlons BIM

Le BIM vu par les industriels avec Laurent ORTAS chez SAINT-GOBAIN et l'AIMCC | Parlons BIM

Votre série d'interviews mensuelles "Parlons BIM" reprend de nouveau après une courte pause estivale, notre ami Jérôme Cornu a eu la chance de croiser et interviewer notre invité pour cette édition Monsieur Laurent ORTAS, responsable du service nouvelles technologies de la prescription chez Saint Gobain et président de la commission BIM à l'AIMCC et AFNOR, très connu à travers son engagement dans les différentes manifestations BIM en France.

Nous découvrirons son parcours, ses missions au sein du groupe Saint Gobain, nous découvrirons aussi le BIM chez les industriels et les fournisseurs, il nous donnera son avis au sujet des objets BIM commercialisés, il nous parlera aussi de la fameuse norme PPBIM XP P07-150 publiée récemment et bien d'autres points autour du BIM.


Bonjour Laurent Ortas, vous êtes responsable du service Nouvelles Technologies de la Prescription chez Saint-Gobain Habitat, quelles sont les missions de votre service ?

Notre service travaille pour les 24 sociétés du groupe. Nous essayons de mettre en place une approche globale sur les questions de la structuration de la donnée, d’où la forte implication de Saint-Gobain dans les travaux de normalisation. Intégrer les travaux sur le BIM nous semble être un très bon support ou processus d’aide à la prescription. En conséquence notre mission touche aussi les questions sur comment adresser les informations produits et systèmes pour qu’elles soient opérationnelles dans différents logiciels pour les économistes, les BET, l'architecte, etc…

 

Quel a été votre parcours ?

Je suis architecte, j’ai ensuite suivi une formation avec le GEPA sur la diversification de la profession en milieu industriel. Avec plusieurs architectes de cette formation nous avons créé, sur Toulouse, une société de conseil à l’industrie sur la relation à l’architecte, à l'architecture, et d’aide à la prescription, un peu comme fait le club Prescrire aujourd’hui. Weber a été un de nos premiers clients. Notre approche était de structurer leurs informations produits et systèmes suivant une problématique métier et en particulier les architectes. On avait en parallèle développé un logiciel de gestion de la documentation produits pour les archis et les économistes. En 96, j’ai rencontré Olivier Celnik. On a inséré notre base de données sur Batonline, qu’Olivier avait créé à l’époque. Ensuite, je suis rentré au Moniteur des TP, pour travailler sur le passage de la publication papier à la publication numérique sur internet, puis j’ai pris la gérance du portail Interbat, qui était un portail dédié bâtiment créé à l’initiative des organisations professionnelles. Je suis ensuite rentré chez Isover, en tant que responsable e-business pour créer leur site internet, et leur database produits pour une exploitation multi canaux. Parallèlement j’ai pris au sein de l’AIMCC la présidence de la commission de réflexions sur les données numériques, on ne parlait pas encore de BIM. Quand Saint-Gobain a créé la branche Habitat, du fait de mes activités sur les échanges de données et ma participation aux travaux AIMCC et Médiaconstruct, j’ai intégré cette structure.

 

Nous parlons assez peu du BIM avec les industriels et fournisseurs de produit pour le bâtiment, pouvez-vous nous dire qu’elle est l’approche de Saint-Gobain ?

Saint-Gobain, en France, promeut avant tout une démarche normative, notamment avec son implication auprès de l’AIMCC et en particulier sur le projet PPBIM. Nous pensons que la réussite du BIM nécessite une démarche « open » afin que tous les industriels agissent dans le même sens, interopérabilité indispensable pour le BIM, tout en pouvant valoriser leurs différences. Il est indispensable d’avoir une approche globale des produits et systèmes afin qu'ils puissent être valorisés dans des outils d’analyse et de calculs.

Aujourd’hui pour des domaines comme la thermique, l'acoustique, le feu, l'environnement les choses sont cadrés, mais il reste encore de nombreuses caractéristiques à valider afin qu’elles soient pousser dans la maquette de manière uniforme. C’est dans cette idée que Saint-Gobain est très impliqué dans le projet PPBIM.

 

Vous êtes président de la commission BIM à l’AIMCC depuis 2004. Comment les industriels en général perçoivent cette révolution du BIM ?

Les industriels sont attentifs, voir attentistes, du marché du BIM. Ils ont tout intérêt à mettre en place des bases de données pour donner un maximum d’informations qui pourront être utilisés dans la maquette, mais avant tout dans les outils de calculs. C’est aussi ce qui va les pousser à être plus innovants. Ces informations doivent être cohérentes pour être exploitables dans le BIM. L’AIMCC tente donc de mettre une démarche globale en place, afin que les industriels travaillent en cohérence, et non plus en divergences. L'AIMCC passe par les organisations qui sont ses adhérents pour faire redescendre ses travaux aux industriels.

Ma formation d’architecte m'aide à avoir une approche globale des processus de conception et construction, alors qu’en général dans l’industrie la vision est plus centrée sur les produits.

 

Il y a un débat en ce moment sur les objets BIM fournis par des sociétés commerciales. Quelle est votre avis vis-à-vis de ces produits ?

Ces objets ne fonctionnent qu'imparfaitement pour la partie industrie des matériaux de construction. Ce sont trop souvent que de belles images. Il manque les informations qui feraient que ces objets soient vraiment utiles à la maquette mais surtout une approche exigences/faisabilité. Une table est un objet indépendant, alors qu’un mur, ou une fenêtre sont des objets systèmes complexes et variants suivant leur environnement et exigences et dans lesquels peuvent interagir plusieurs fournisseurs avec différents produits. Tant qu'on n'est pas à un niveau exécution le niveau de précision est trop faible pour que l’on puisse réellement positionner des objets produits. dans la CAO. De plus la plupart du temps la définition de ces objets est le résultat de calculs hors CAO

L'approche est donc plutôt système mais pour pouvoir adresser un système industriel dans la maquette numérique il est également nécessaire que, par exemple, un mur soit au minimum décomposé en couches Parement / Structure / Parement. Un système d’isolation thermique par l’extérieur ou d’enduit pouvant ainsi être adressés à la couche Parement (extérieur) et un système MOB ou maçonnerie à la couche Structure, etc… Ces travaux sur les Modèles génériques d’Objets sont développés dans le cadre de la Product Room de Médiaconstruct.

Il y a aussi la question du détail, à quel moment positionner et comment transférer les informations de la vis, du rail, de la colle ... sans doute pas dans la CAO mais peut être dans les outils BIM de l’économiste ou de l’entreprise. Mais il faut quand même que cette information est un lien avec l’objet défini dans la CAO

Dans le cadre des travaux AIMCC / Médiaconstruct nous réfléchissons à comment créer une interface qui créerait un dialogue entre les professionnels sur les exigences acoustiques, thermiques, hygrométriques, feu, etc…, et les produits proposés par les industriels et qui permettrait d’avoir une relation de conseil ou d'expertise en fonction du besoin réel du client, c’est à dire avoir des Objets communiquants au lieu d’avoir comme aujourd’hui des Objets qui ne sont que des avatars BIM des catalogues papiers ou web.

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Pouvez-vous nous parler de la norme PPBIM XP P07-150 ?

C’est une norme de méthode « qualité » et « process » plutôt pour les éditeurs de dictionnaires. Il existe aujourd'hui plusieurs dictionnaires au niveau européen, le but de cette norme est donc via cette méthode de faire converger l'ensemble des travaux réalisés au niveau européens voir au delà.

En France nous avions le dictionnaire DTH qui sera mis à la norme dans le cadre des travaux du PTNB puis  au delà devrait être pérénisés dans une structure associative qui accueillerait le collège des experts qui en validera le contenu conformément à la norme. Ces experts seront issus de l'industrie et des métiers. Des modèles génériques d'objets IFC, comme abordé au chapitre précédent, auxquels seront rattachées les propriétés définies dans le dictionnaire pourraient se connecter à des data-catalogues conformes à ce même dictionnaire et modèles génériques d’objets et ainsi offrir aux concepteurs la possibilité de composer des Objets multi-fournisseurs comme décrit auparavant.

J’ai vu que vous faisiez parti du projet collaboratif CIMBEES (conception et industrialisation de modules de bâtiment à haute qualité énergétique, environnementale et sociale). Venant de la construction modulaire, je suis fortement intéressé par ce concept. Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela consiste, et quel est le rôle de Saint-Gobain ?

Un charpentier bois et un architecte ont lancé le concept Natura qu’ils avaient exposé devant la gare de Strasbourg en 2012. Suite à ce prototype, dans le cadre d'un projet de recherche FUI, nous avons travaillé sur le développement d'outils permettant de BIMer ce concept de maisons modulaires. La maquette numérique a été introduite, pour pouvoir travailler dans un processus BIM IFC depuis le projet de l'architecte sous Revit, sa décomposition sous eveBIM en couches parement/structure/parement comme expliqué quelques chapitres plus haut, export IFC des couches structures de la calculs du systèmes MOB sous Cadwork, transmission aux machines numériques du charpentier et réimport dans le projet pour recompilation de la configuration des différents systèmes et édition des plans de pose.

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Que pensez-vous de la communauté aussi virtuelle que réelle Hexabim ?

Aujourd’hui il y a plusieurs bonnes initiatives autour du BIM, et comme nous souhaitons le faire avec PPBIM, il vaut mieux mutualiser les efforts, et se rapprocher du blog de Médiaconstruct, pour avoir une véritable coopération et coordination entre tous les contributeurs autour du BIM.


Un grand merci à Laurent ORTAS de nous avoir accordé cette interview, nous lui souhaitons beaucoup de courage pour les missions qu'il assure au sein de Saint Gobain et toute la communauté du BIM.
Joyeux anniversaire dans le passage à Saint Gobain pour ses 350 ans.

Merci à Jérôme CORNU qui a assuré cette interview et qui nous a fait découvrir cette personnalité.

Je vous souhaite à tous et à toutes une bonne (BIM) reprise !

 

Credit image : saint-gobain.com
 

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