Convention BIM : Un outil en avance sur son temps et adaptable aux défis de l’IA
La convention BIM est bien plus qu'un simple document contractuel : elle structure les processus, les outils et la gestion des données dans la construction. Mais avec l'essor de l'IA, comment s'adapte-t-elle aux nouveaux enjeux technologiques et juridiques ?
David Richard, avocat au barreau de Paris et médiateur RICS, analyse l'évolution de cet outil clé, entre structuration, flexibilité et nouvelles perspectives. Merci à Rami CHETOUI (Architecte, M. Ing. - Responsable BIM / dessin – Enseignant) pour sa contribution et sa relecture attentive de cet article.
Convention BIM : un virage technologique
Avec le cahier des charges BIM, la convention éponyme symbolise la transformation digitale de l'industrie de la construction, traditionnellement organisée au travers de marchés de travaux et de contrats de maîtrise d'œuvre. Précisons que le terme « convention BIM » n'est pas universel, par exemple les britanniques, comme la série ISO19650 qu'ils ont inspirée, parlent, elle, de BIM Execution Plan (BEP) associé au protocole BIM (BIM protocol).
Au-delà de la différence terminologique, la convention BIM possède une valeur contractuelle, si les parties l'ont décidé, mais pas le second. Chaque système présente des avantages et des limites. Ainsi, la convention BIM favorise sans doute un process plus structuré au prix d'une certaine rigidité. Le BEP, lui, offre plus de souplesse, par exemple en cas de modification, mais avec probablement une portée moins globale, puisque la dimension contractuelle de la démarche BIM figure dans un protocole BIM ou directement dans les contrats.
Un virage qui débouche sur une ligne droite
Les pratiques diffèrent en matière de convention BIM, et le développement de la digitalisation du monde de la construction se poursuit. Cependant, leur utilisation est aujourd'hui la règle. En adoptant ce document, qui organise la dimension technologique d'activités traditionnelles : concevoir, construire ou exploiter un bâtiment, les professionnels de la construction sont des précurseurs au regard de ce qui se passe actuellement plus largement avec l'avènement de l'IA. La convention BIM est donc un avantage pour appréhender ces évolutions, qui d'une certaine façon poursuivent le virage technologique initiale. Reste, bien entendu, à prendre en compte ces évolutions.
Les trois piliers : outils, data et management |
Les conventions BIM sont des documents porteurs d'une approche d'ensemble. Elles décrivent la mise en œuvre d'outils technologiques, dans le but de concevoir ou de construire voire exploiter un bâtiment ou une infrastructure, sur la base de certaines finalités (cas d'usage). Cette logique systémique est donc pertinente. Toutefois, la nouvelle poussée digitale, liée à l'IA pour faire simple, accentue nettement l'importance du recours à la technologie, que l'on peut, pour l'appréhender plus simplement, décomposer autour : des outils – ou disons les solutions logicielles, la data et les process ou le management. |
Et, ces composants parties intégrantes des conventions BIM ont tendance à devenir des éléments à part entière. Cela semble particulièrement vrai pour les outils, voire plus encore pour les data. |
Process ou management : toujours
L'organisation du projet BIM correspond au cœur des conventions du même nom. Elles désignent en effet les acteurs du processus, leurs prérogatives et leurs obligations, comme elles définissent le rôle du BIM Manager, des coordinateurs et BIM modeleurs, l'objet du processus BIM et les cas d'usage, l'organisation de la collaboration ou encore le contrôle qualité, pour s'en tenir à l'essentiel. Tous ces aspects sont bien entendu essentiels et ils le demeureront. Pour autant, ils devraient, voire prennent déjà de l'ampleur. Plus de technologie signifie une augmentation des solutions et des acteurs, et en suivant un niveau d'organisation supplémentaire.
Outils : encore plus
Les conventions BIM comprennent également une description des solutions logicielles utilisées, et plus largement des systèmes d'information. Cela inclut la ou les plateformes collaboratives CDE (common data environment), ou encore les besoins liés à l'infrastructure digitale du projet ou du maître d'ouvrage. L'arrivée de l'IA va favoriser l'émergence de nouveaux outils ou un changement de la technologie des outils existants, mais aussi permettre des interactions avec des outils extérieurs au projet. Les environnements systems vont donc devenir plus riches et plus puissants, mais aussi plus précis et plus exigeants, faisant que cet aspect va se consolider. En marchés privés, cette évolution appelle des efforts de préparation, mais pour la commande publique l'exercice pourrait être plus complexe en raison du principe imposant des spécifications techniques objectives.
Data : encore et encore !
La gestion des data est un sujet central des conventions BIM. Pour mémoire, elles indiquent les acteurs devant produire les données et les traiter, leur granularité, la norme d'information et les règles d'échange et de validation. De même, les conventions évoquent la protection des données par la propriété intellectuelle ou les données personnelles, leur confidentialité ou encore la cybersécurité. Tout ceci va demeurer, mais il semble bien que l'IA suppose l'usage de données qui s'en trouvent valorisées. D'une certaine façon, les conventions BIM peuvent aussi être perçues comme de véritables Data contracts ou Data agreements en tant que tel. Cela n'impose pas une modification de la nature des conventions BIM. Simplement, la perspective Data contract permet de donner la mesuredes enjeux, et par-là de contrôler la fiabilité du cadre commun, afin de sécuriser les intérêts de toutes les parties prenantes.
Convention BIM AI
Revisiter la convention BIM sous l'angle outils, data, management montre à la fois leur pertinence pour la mise en place d'un processus technologique, et comment elles peuvent s'adapter aux mutations actuelles. Comme toujours, cet effort d'adaptation variera en fonction des projets et des acteurs, et il prendra plus ou moins de temps, même si le temps ne cesse d'accélérer pour tous.
Enfin, signalons au besoin que cette nouvelle étape reste, comme les précédentes, motivée par l'ambition de produire des bâtiments et infrastructures de qualité.